Les téléphones portables
et la conduite
Audrey, 14 ans, faisait du vélo le 4 avril 2001 sur une route de Seine-et-Marne quand elle a été fauchée et tuée par une automobiliste : celle-ci avait perdu le contrôle du véhicule alors qu'elle téléphonait sur son portable. Il y a de plus 6 blessés dont un garçon de 16 ans qui est tétraplégique.
Le tribunal correctionnel de Fontainebleau a rendu son verdict : deux ans de prison avec sursis alors que le ministère public avait requis deux ans, dont six mois ferme. Cette peine est assortie de l'annulation du permis de conduire et de l'interdiction de le repasser pendant deux ans et une amende de 1 350 euros et 7 000 euros de dommages et intérêts (à tout cela il faut ajouter l'influence future sur le contrat d'assurance).• Téléphoner en conduisant ? Tout le monde pressent que c'est dangereux, mais personne ne peut dire actuellement à quel point. Les travaux sur le sujet sont encore ponctuels et on ignore combien d'accidents résultent de l'utilisation du portable.
• Seule certitude : les études scientifiques sérieuses sur la question concluent toutes qu'il existe un lien entre le fait de téléphoner en conduisant et un risque accru d'accident.
Deux mains pour conduire • Combien de personnes conduisent quotidiennent une main sur le volant tandis que l'autre tient le téléphone ? Le conducteur devient manchot. Au volant d'un véhicule classique, il est évident qu'il ne saurait piloter sereinement et en toute sécurité.
• Privé d'un grand nombre de possibilités de réactions, le conducteur adapte-t-il son comportement lorsqu'il téléphone ? Des études suédoises sur le terrain ont montré que l'automobiliste qui téléphone ne prend pas de distance par rapport au véhicule qui le précède et qu'il ne réduit que faiblement sa vitesse (moins 10 km/h pour un conducteur sur 10). C'est bien peu !
Téléphoner accapare la concentration • N'étant pas des surhommes, nous ne sommes pas capables de traiter plus d'une information à la fois. Ainsi, l'attention accordée au fait de téléphoner est prise sur la conduite. Le niveau d'attention diminue, les temps de réaction augmentent, le regard se focalise sur le devant de la route au détriment des rétroviseurs et des côtés. Le conducteur anticipe moins, il oublie de s'arrêter au passage piéton, mémorise moins les panneaux de signalisation, "mord" davantage la ligne médiane... Même une conversation banale diminue fortement l'attention portée à la conduite. Et même un conducteur aguerri est moins attentif à la route lorsqu'il téléphone.
• Les kit mains-libres constituent-ils une bonne solution ? En réalité cet équipement préconisé par les opérateurs tiennent davantage du leurre que d'une réelle sécurité. S'ils permettent au conducteur de garder ses deux mains sur le volant, ils ne diminuent en rien la distraction et l'effet néfaste sur la concentration et l'attention.
• Téléphoner s'apparente-t-il au fait de discuter avec un passager du véhicule ? Certainement pas. Car le passager qui dialogue avec le chauffeur est solidaire de la conduite et de la sécurité à bord : il adapte ses interventions à la route et aux dangers potentiels. En revanche, le conducteur qui téléphone met plus ou moins de côté les commandes pour rejoindre son interlocuteur qui, lui, ne le voit pas.
• Une personne a même été outrée d'avoir été verbalisée alors qu'elle conduisait en utilisant un agenda électronique avec un stylet de commande, donc en quittant la route des yeux !!! (d'après elle ce n'est pas dangereux).Danger majeur : la réception d'appels• Le problème majeur, ce sont moins les appels que l'on donne que ceux que l'on reçoit. Car le conducteur reste maître de ses propres appels - l'idéal étant, bien sûr, de s'arrêter pour téléphoner. En revanche, les appels provenant de l'extérieur sont incontrôlables. Le plus souvent, l'appelant ignore même que son interlocuteur est en train de conduire.
• Et lorsque le téléphone sonne, on décroche vite, très vite. Une étude menée par l'INRETS (Institut National de Recherche sur les Transports et leur Sécurité) a montré que 50 % des conducteurs sur autoroute et 25 % en ville décrochaient en moins de 2 secondes. Autrement dit dans l'urgence, en accordant la priorité à cette tâche. Comment rester vigilant et attentif à sa conduite dans de telles conditions ? Selon cette même étude, 42 % des accidents dûs à l'utilisation du portable ont lieu en décrochant, 31 % en composant le numéro et 16 % pendant la communication. Des chiffres qui parlent d'eux-mêmes...
Quelques conseils
• Pas question de nier l'intérêt du téléphone portable. Y compris sur la route où il peut rendre de grands services, pour prévenir les secours en cas d'accident, téléphoner à un dépanneur, etc...
• Pour ne conserver que les aspects positifs du portable, il est impératif de respecter quelques règles de sécurité :
• couper la sonnerie lorsque l'on roule ;
• brancher la messagerie ;
• pour passer un coup de fil ou récupérer les messages, s'arrêter dans un lieu adapté. C'est-à-dire ni sur la bande d'arrêt d'urgence sur l'autoroute ni en double file ou au feu rouge si l'on est en ville...
Code de la route
Section 2 : Principes généraux de circulation
Article R412-6
I. - Tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un conducteur.
II. -
Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manouvres qui lui incombent. Ses possibilités de mouvement et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ou par l'apposition d'objets non transparents sur les vitres.
III. - Le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions du II ci-dessus est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe.
IV. - En cas d'infraction aux dispositions du II ci-dessus, l'immobilisation du véhicule peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3.
Article R412-6-1
L'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation est interdit.
Le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions du présent article est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la
deuxième classe.
Cette contravention donne lieu de plein droit à la réduction de
deux points du permis de conduire.
En revanche, et la nuance est importante, le kit main libres peut être puni d'une contravention si les forces de l'ordre estiment qu'il gêne la conduite, qu'il entraîne un comportement dangereux, ce qui est assez facilement imaginable quand il faut numéroter, ou décrocher.
Et puis surtout, l'usage du téléphone peut être recherché après un accident: la police demande aux opérateurs si tel téléphone portable était actif au moment d'un accident. Et là, l'usage du kit main libre sera puni d'une contravention, a posteriori.
Bref, tant qu'il ne se passe rien, l'oreillette est tolérée mais elle sera réprimée a posteriori si elle nuit à la sécurité de la conduite.Ainsi, un conducteur en train de téléphoner sera condamné à payer une amende de 2ème classe forfaitisée s'élevant à 35 EUR.
Courant janvier 2000, la recommandation de Madame Guigou a été largement relayée par les Procureurs de la République et notamment ceux de Marseille et de Bobigny qui ont demandé que les verbalisés soient systématiquement déférés devant le tribunal de police où leur amende peut être portée à 150 EUR.
Question posée par un député au Ministre de l'Intérieur : si un automobiliste qui est arrêté à un feu rouge ou à un péage autoroutier a le droit d'utiliser son téléphone portable pendant qu'il est à l'arrêt.
Réponse du ministère : Le décret n° 2003-293 du 31 mars 2003 a effectivement créé une incrimination spécifique d'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation, incrimination reprise dans l'article R. 412-6-1 du code de la route. Le contrevenant encourt l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe et l'infraction donne lieu de plein droit à la réduction de deux points du permis de conduire. Un automobiliste marquant l'arrêt à un feu rouge ou à un péage autoroutier se trouve indubitablement en situation de circulation, devant conserver la maîtrise de son véhicule, ce qui recouvre les phases d'arrêt, de déplacement et de mouvement, dont les arrêts prescrits pour le respect de la signalisation située sur les infrastructures routières et autoroutières ne sont que la conséquence. C'est pourquoi de tels arrêts ne peuvent, en aucun cas, être assimilés au stationnement tel que précisé à l'article R. 110-2 du code de la route et qui est lui-même défini comme l'immobilisation d'un véhicule sur la route hors les circonstances caractérisant l'arrêt. En conséquence, un automobiliste ne saurait faire usage d'un téléphone tenu en main, alors qu'il est à l'arrêt à un feu rouge ou à un péage autoroutier, sans encourir les sanctions prévues par l'article R. 412-6-1 du code de la route.